ACTUEL
Le Prince des annees 90? Tout le monde parie, nous aussi.
Il y eut le nombril de Madonna, les barbes de ZZ Top, le mauve et les talons compenses de Prince,
il y aura le chapeau de Jason Kay, le chanteur de Jamiroquai! Une curieuse touffe de poils a cornes qui lui dessine une tete de
Tarass Boulba, l'air dur et les moustaches en moins. A la ville comme sur scene, personne n'a jamais vu Jason le front decouvert.
Comme s'il s'etait visse ce chapeau sur le chef pour empecher ses idees de se gaspiller. Vingt-deux ans, embarque sur les sentiers du
combat ecolo, Jason explore de nouveaux territoires, mele divers heritages. Jamiroquai prend a Stevie Wonder, a Herbie Hancock.
Jamiroquai invente un son.
Debut Juin, le groupe donne un concert (complet, bien sur) a la Brixton Academy, a Londres.
Norman Jay, un des DJs les plus connus, balance des vieux Roy Ayers, toute la salle danse.
Le public, bon enfant, se montre plus detendu qu'a Paris. Sur scene, un decor de vaisseau fantome.
Les violons de Reggae Philarmonic Orchestra caressent un rythme soul et la voix de Jason Kay. Cette voix de Jamiroquai,
que la maison de disque Sony a signee pour huit albums en abandonnant a l'artiste le controle total de ses creations.
Le genre de contrats qu'on offre aux Prince, Madonna et Jagger. En moins d'un an, Jason est devenu la premiere star de la
scene soul jazz londonienne. Une situation qu'il savoure en promenant un regard heureux et un sourire de malice.
Sa musique s'est liberee du ghetto branche grace a un tube sur l'environnement, «When You Gonna Learn».
A la veille de la sortie de son premier album, le rebelle ecolo qui roule dans une BMW decapotable de 1972 est attendu au tournant.
«Je veux etre positif et fidele a mes croyances. Aux gens qui me montrent du doigt, je poserai un jour la question :
"Et vous, qu'est-ce que vous avez fait?" Etre positif vous fait passer pour un ringard aujourd'hui. Je trouve ca triste.
Je ne me prend pas pour le porte-parole d'une generation. Mais j'ai les boules, je suis jeune et j'en parle.»
Actuel... Facile d'avoir les boules avec un contrat en or!
Jason Kay... Je realise les bons et les mauvais cotes de ce qui m'arrive. Le jeu c'est de gagner le respect des gens.
Je veux garder ma musique credible. Je suis conscient d'avoir signe avec une multinationale qui fabrique de la
micro technologie pour les armes nucleaires. Il faut se battre de l'interieur. Je resterai fidele a mes valeurs.
Mes principes seront toujours plus importants que la vente de mes disques.
Actuel... Pourquoi tu n'enleves jamais ton chapeau?
Jason Kay... J'aime quand la sueur me coule dans les yeux sur scene. Je ne peux pas m'en passer.
Personne ne pourrait vivre dans mon chapeau de fou. La sueur me rappelle qui je suis.
J'en ai besoin pour ecouter le monde. Je suis a l'ecoute de la planete. Je lis les livres religieux qui parlent de paix,
la Bible, le Coran, et pourtant je les vois tous se battre, chretiens, juifs, musulmans.
Actuel... «Revolution 93» sur ton album, c'est pas un peu naif?
Jason Kay... C'est pour bientot man, je te le dis. La revolution dont je parle ne se produira pas dans une centaine d'annees.
La tele montre ce qui se passe dans le monde, notre comprehension se developpe. Les gens vont se reveiller.
Les milliards de chinois, le tiers-monde. Le jour du boum, on dira qu'on voulait les aider, mais il sera trop tard.
On ne se bat pas assez pour eux. Le ying et le yang s'appliquent aussi a l'equilibre de la planete.
